Jusque très tard (15 ans) je ne lisais pas. Des bandes dessinées, des journaux mais aucun "vrai" livre. Mon frère, qui n'avait pas besoin de prétexte pour manifester son dédain en trouvait là un livré clé en mains.
Ca a été ainsi jusqu'au jour où l'on m'a diagnostiqué une Hépatite A qu'on s'obstinait à l'époque à appeler "jaunisse", nom beaucoup moins anxiogène et presque ridicule.
Je garde un souvenir merveilleux de ces 4 ou 5 semaines pendant lesquelles j'étais étendu à la maison, dorloté comme jamais et que les cadeaux s'amoncelaient au pied du lit.
Les copains venaient apporter les cours, mes soeurs revenaient de l'école, encore énérvés de la journée tandis que la mienne, douillette, s'était passée à lire des histoires passionnantes.
Une amie de ma mère (qu'elle soit à jamais bénie) qui était une femme adorable m'avait apporté une édition en poche du livre de Jules Verne "Mathias Sandorf". C'est mon premier livre lu et je l'ai dévoré sans jamais l'oublier.
Mon frère a tenté et réussi l'essai en me passant en suivant les gros volumes de "Rocambole" par Ponson du Terrail.
De ce jour, je me suis mis à lire comme si ma vie en dépendait.
Ca n'a jamais cessé depuis.
Il m'est arrivé de reprendre à la bibliothèque des livres qu'à mi-parcours je reconnaissais pour les avoir déjà lus. De relire certains passages jusqu'à les connaître par coeur et même d'alimenter mes rêves avec certains passages particulièrement éblouissants.
De mes toutes premières lectures jamais je n'oublierais le passage de "Robinson Crusoë" qui voit le solitaire découvrir une empreinte de pieds sur le sable de son île déserte. Aucun film ne rendra ce que l'imagination a pu produire à propos de ces quelques lignes...
J'ai lu tant de livres que parfois je regrette de ne pas en avoir écrit!
Mais quand on est ni Orwell ni le Celine du "Voyage" à quoi bon?