Les raisins de la colère

 Je ne saurai dire combien de temps il m'a fallu pour lire les 670 pages du livre "Les raisins de la colère" de John Steinbeck* (1930) livre fondamental et magnifique qui est considéré, à juste titre, comme un chef d'œuvre mondial de la littérature et dont presque tout le monde a entendu parler. Je rectifie car l'enthousiasme me fait proférer des âneries: un livre reconnu par le "monde des lettres" comme une œuvre majeure de la littérature du XXème siècle et même tout simplement de la littérature.

J'y suis venu par hasard: j'ai vu quelque part, dans un livre lu récemment, une biographie de Pie XII ("Pie XII le Pape face au mal" Perrin Biographies 2024) que Steinbeck parlait, dans "Les raisins" d'un bébé humain mangé par des porcs**. J'avais déjà entendu dire cela et me suis retrouvé, sans l'avoir cherché, devant une pile de livres dont le Steinbeck en éditions de poche (Folio) à ma librairie toulousaine favorite.

Je suis passé d'une biographie du Pape de la seconde guerre mondiale au déracinement des américains de l'Oklahoma fuyant la pauvreté vers la Californie suite à la crise de 1929. L'Histoire des Joad est magnifiquement composée et ne souffre pas d'une nouvelle traduction récente (signée Jacques Recoursé). Pour l'anecdote le livre a valu à son auteur le Prix Nobel de Littérature en 1962. 

...Autrement mérité que celui d'Annie Ernaux soit dit en passant et de manière complètement surréaliste!

Peu de livres possèdent cette richesse évocatrice des personnes humaines, de leurs relations, de leur société, de la pauvreté, de l'économie et, en fin de compte de la vie. 

Cette fresque foisonnante et juste, qui donne à voir la condition humaine dans ce qu'elle a de douloureux comme de beau, de triste, d'implacable, de fragile, d'injuste et d'universel m'a captivé comme peu de livres y sont parvenus ces 5 dernières années. 

Je ne crois pas qu'un film (fût-ce l'adaptation même des "raisins" par John Ford avec l'immense Henry Fonda) peut avoir la puissance évocatrice de l'écriture (et du plan) de ce livre. 

J'attendrai un peu avant de lire un autre roman de Steinbeck. Trop peur d'être déçu. 

* (en fait, si, une semaine mais j'ai été un zombie pour mon entourage!)

** On a les déclics qu'on peut. Je signale par ailleurs qu'un CD de Bruce Springsteen porte le nom du héros des "Raisins de la colère". Son titre? "The Ghost of Tom Joad" (1995) Evidemment superbe.