"vérités alternatives"

Nous ne saurions dire précisément quand ça a commencé mais ça a pris une dimension aussi importante que déconcertante. Comme l'écrivait La Fontaine pour la peste: "ils ne mouraient pas tous mais tous étaient frappés" ainsi aujourd'hui de la contagion des fausses nouvelles, des informations déformées, des "vérités alternatives", des fake news et autres délires. Pas une journée sans qu'une personne, souvent inattendue, se mette à soutenir devant vous quelque chose de bizarre ou d'erroné. Comme les rumeurs ces faits défendus mordicus partent d'une information incomprise ou mal comprise, répétée telle que saisie au vol et souvent enrichie de détails absurdes censés lui donner plus de véracité. La vigueur, l'autorité avec laquelle ces propagateurs d'insanités avancent est sidérante. Lorsque leurs montages présentent des défauts structurels, des détails qui ne vont pas; ils trouvent une parade provisoire afin de conserver à leurs élucubrations l'aspect d'une "vérité".

N'étant ni un spécialiste du cerveau ni un sociologue je me garderais de donner des explications sur ces cas pathologiques de croyances spontanées. La peur d'affronter le réel (angoissant), l'envie ou le besoin d'être initié, de passer pour quelqu'un d'informé, le besoin de croire à des complots, l'adhésion à des thèses jusqu’au-boutistes, l’irrationalité apparente de certains faits, les manipulations de groupes politiques ou religieux, la paranoïa... les pistes sont nombreuses pour expliquer les propos que tiennent ceux qu'on appelle les "complotistes"  et ce que j'ai entendu ce matin d'une voisine, ancienne professeur à savoir que "La Russie n'a pas attaqué l'Ukraine" m'a fait fuir: J'en ai assez entendu et ai tourné les talons sans discuter.

Ce phénomène mondial et invasif a des devanciers. La recherche de boucs émissaires en est une des manifestations. Les explications irrationnelles de faits historiques (la légende de Jeanne d'Arc) aussi. Certains faits du passé (mort de Louis XVII, mort des Romanov, mort d'Hitler, mort de Kennedy, naufrage du Titanic... ) sont contestés et remis en cause par des adeptes de toutes sortes de théories qui en nient sinon la réalité du moins la manière dont elle s'est exercée. De temps à autres des théories sans fondement (Le triangle des Bermudes) obtiennent, malgré leur fausseté, une reconnaissance de jure.

Je me souviens qu'en 2001, lors de l'explosion de l'usine AZF de Toulouse certains n'en démordaient pas: c'était un terroriste qui en était responsable. On avançait pour preuves la découverte d'un cadavre avec plusieurs sous-vêtements empilés les uns sur les autres.

Les attentats du World Trade Center ont donné lieu à tout un fatras de raisonnements fallacieux et d'explications idiotes qui aujourd'hui encore sont véhiculés par des gens qui, verraient-ils un tireur abattre quelqu'un diraient le contraire.

Le plus sage est d'abord d'accorder sa confiance à des personnes dont le passé les rend dignes. Vérifier ce qui est dit ou écrit, utiliser plusieurs sources "traditionnelles" est gage de sérieux. Lorsque le fait raconté est aussi surprenant que "scandaleux" écoutez votre instinct. Il vous dit qu'il y a un problème.

Dans tous les cas poussez votre interlocuteur, celui qui soutient quelque chose d'invraisemblable, dans ses limites: où a t'il eu cette "information? de qui la tient-il? pourquoi en a t'il été informé? Pourquoi cela n'est-il ni abordé ni confirmé par la presse et les moyens d'information traditionnels? pourquoi serait-ce secret?

Presque à chaque fois la discussion s'arrête parce que la formulation dune certitude n'en garantit jamais la véracité.

Quant aux remises en cause de thèses historiques consacrées le mieux est encore, après analyse; de n'en rien dire et de leur opposer un juste mépris. Si certains désirent que le Président Kennedy a été tué par la CIA qu'ils le croient. Si d'autres pensent que Elvis Presley est encore en vie et a choisi le retour à l'anonymat également. Qui cela gêne t'il?