J'ai relu le livre de Rithy Panh (co-écrit avec Christophe Bataille): "l'élimination" publié il y a quelques années chez Grasset. (et paru en Poche depuis).
Rithy Panh est, je le rappelle, un cinéaste Franco Cambodgien à qui l'on doit des films et des documents qui tous, de près ou de loin, nous alertent sur le totalitarisme, sa mise en place et son fonctionnement en se remémorant l'effroyable dictature Khmère-rouge (1975-1979) qui ravagea un petit pays rattrapé par la guerre américaine au Vietnam et la lutte entre les communismes Chinois et Soviétiques. Cette "expérimentation à ciel ouvert" coûta la vie à 1,7 millions de personnes, hommes, femmes et enfants sans distinction puisqu'ennemi vous étiez, votre famille élargie devait disparaître ("être éliminée") avec vous.
Ce communisme intégral (manger un insecte ou une plante vous coutait la vie si l'autorisation de le faire ne vous avait pas été formellement donnée), qui nia tout, de la nature (barrages ubuesques sur les rizières) à la famille (les enfants appartenaient au Parti) dura peu mais eut le temps de détruire en profondeur les liens tissés par l'Histoire dans un pays agricole de culture religieuse et tolérante.
Exécutions sommaires brutales, police politique omniprésente, tortures, confessions imbéciles arrachées, destruction des pagodes, villes évacuées de force, malades et souffrants éliminés comme "bouches inutiles", catéchisme marxiste répété sans arrêt et famines organisées furent organisées à grande échelle à la façon de Mao mais en plus rapidement encore. Rien ne devait subsister du passé.
Un désastre humain qui a fait que l'Asie a elle aussi sa place dans le club des continents et des hommes ayant organisé et conduit un génocide impitoyable sur leurs terres.
Rithy Panh, par le choix de son interlocuteur, un Eichmann Khmer ou un Dzerjinski Cambodgien, comme vous voulez, le sordide Douch, administrateur de la mort aux mains propres démonte un mécanisme qui, hélas, nous guette tous et toutes. Et nous, "victimes" potentielles , jouons avec le feu tandis qu'il se rapproche.
Vous connaissez la phrase: "qui ne tire pas de leçons du passé est condamné à le revivre". Ricanons avec les autres, il sera toujours temps de pleurer.
*Les Khmers rouges donnaient l'exemple du boeuf comme à suivre: il mange peu et travaille beaucoup.