Ce n'est pas tirer sur une ambulance que critiquer "le grand journal" de Canal plus
présenté par celui qu'on pensait indéboulonnable et qui a le bon goût de partir de
lui-même, Michel Denisot.
A l'occasion de son départ annoncé on nous rappelle que cette émission télévisée
a déjà dix ans d'existence dans sa formule actuelle, avec quelques arrangements
ici ou là mais à la marge. Dix ans! Dix ans.
Il en est peu, dans ce pays, qui n'ont pas vu au moins une édition de ce grand journal
autoproclamé.
Personne n'a pu échapper à la bêtise contente d'elle-même du maître de maison,
à ses partis pris, à ses tics et à toutes ses limites.
La première des limites de l'émission comme de son animateur est dûe à
l'inculture de ce dernier.
On ne peut pas lui jeter la pierre: l'immense majorité de ses collègues animateurs
ou journalistes est aussi déficiente que lui. De Ruquier à Fogiel en passant par
toutes les "vedettes" c'est la même connaissance superficielle façon Reader's
Digest qui est la norme. On ne lit pas les livres qu'on présente, on écoute ce qui
se vend, on va voir les films consensuels ou leur contraire à l'exclusion de toute
démarche intellectuelle originale.
Ne parlons pas de démarche intellectuelle volontaire....
Dans tous les domaines on reste à la surface des choses en privilégiant le cynisme
ambiant et une culture bobo.
Le sport, comme le reste est traité en fonction de ses aspects "people" et le
cinéma y est caricatural à souhait comme l'effroyable quinzaine de Cannes pour cette
émission.
les invités défilent, toujours les mêmes, qu'on voit d'abord ici puis qui font leur tour
des médias en passant par "C à vous" (l'émission concurrente mais qui semble
décalquée du "Grand Journal), "Salut les Terriens" et tant d'autres avant d'aller
répeter les mêmes choses, à la virgule près sur les radios.
On est toujours aux petits soins pour ces invités de prestige et qu'on soit Jean
Claude Van Damme ou Lionel Jospin les rites d'accueil et les questions posées
le sont sur les mêmes critères. On se fiche des réponses. La question importe
toujours plus que la réponse car elle met en valeur le meneur de jeu.
Depuis 10 ans le cocktail est inchangé: Insolence calculée, ricanements, jeux
idiots, chroniques imbéciles, interventions stupides ou exercices vains de rigueur.
Les "chroniqueurs" enfoncent les portes ouvertes avec constance et détachement.
Apathie, les bécasses de service et tout le staff respectent l'impératif publicitaire.
On est sur Canal mais la loi est la même pour tous: le temps de cerveau disponible
pour Coca-cola.
Denisot est plus sévère qu'un juge lorsqu'il s'agit de ses marottes. Le "zapping",
cette connerie qu'on ne présente plus doit commencer à la minute prévue et tant
pis si on interrompt un invité, la météo doit mettre en valeur les Miss Météo de la
chaîne qui deviennent des "acrtrices" de cinéma canal + et les poussiereux guignols
qui font encore rire Denisot et quelques attardés qui croient qu'ils sont subversifs.
N'oublions pas la promotion des produits Canal + ou dérivés. Les films Canal +,
les artistes Canal +, ceux qui ont débuté sur la chaîne et ceux qui aspirent à y
cachetonner...
Il faut voir l'air content de lui de Denisot lorsqu'il réussit à placer une blague niveau
Carambar ou, mieux, lorsqu'il pose une question qu'il pense pertinente à son invité
en roue libre. De toute façon le public de l'émission, un échantillon de décérébrés
dont on ne rencontre de tels specimens que dans les hopitaux psychiatriques, fera
une ovation à un Séguéla sur injonction de leur maître.
On n'apprend jamais rien au "Grand Journal", l'émission ne distrait qu'à peine et
qu'on la regarde le 13 janvier ou le 25 mars c'est le même cérémonial guindé et
creux.
Denisot s'en va? la belle affaire! ça fait dix ans qu'il n'était plus là.
PS 19/06/13. Antoine de Caunes est sur les rangs et en bonne place
pour occuper le siège de Denisot, dans une version renouvelée du
"grand journal". J'aime Antoine de Caunes (j'adorais "Rapido" et j'aime
son humour, sa façon d'écrire et j'ai les mêmes goûts musicaux que lui)
mais je ne suis pas certain qu'il ait à gagner à accepter cette sinécure.
Usée et impossible à alléger à cause des contraintes publicitaires et
d'audience. Bah.... on verra bien.