Évidemment le nom de Raymond Barre, décédé en 2007, ne dit rien aux jeunes générations. L'homme a été 5 ans premier ministre de Giscard, de 1976 à 1981. Comme Fillon il a essayé de passer de la case Matignon à la case Élysée, lui c'était en 1988 et il en a été empêché par Jacques Chirac.
Raymond Barre avait une image de docte professeur, de "père la rigueur" pas commode et de gestionnaire rigoureux des finances hexagonales.
On se souvient de lui comme de celui qui avait dit un jour: "(au lieu de se plaindre) les chômeurs n'ont qu'à créer des entreprises" et on se rappelle les "TUC" ou travaux d'utilité collective, sorte de SMIC mâtiné de RSA. Une humiliation sous-payée inventée par la technostructure. (recyclée sous le vocable de CPE par Dominique de Villepin quelques années après, avec le succès que l'on sait).
De sa voix flûtée l'homme fustigeait les uns et les autres, surtout le peuple, pour sa supposée fainéantise, ses révoltes inopportunes et ses réclamations perpétuelles. Un grand argentier moins méprisant que le président qu'il servait mais hautain et déconnecté du pays réel.
Le "Canard enchaîné" daté du 4 juillet nous le révèle en millionnaire en euros, titulaire de comptes suisses et magouilleur en terrains immobiliers (l'affaire de sa villa de St Jean Cap-Ferrat était connue mais avait été oubliée).
La liste de ces hommes politiques, riches à millions, qui n'ont pas de mots assez durs pour qualifier les fraudeurs du RSA, les chômeurs endormis ou les tricheurs à la petite semaine est si longue qu'on ne saurait en voir la fin. Après le châtelain Fillon (mais avant, chronologiquement) voilà Barre qui inscrit, de manière posthume, son nom dans la liste des gens que la politique a considérablement enrichis sans contrepartie pour le pays qu'ils géraient en se servant généreusement.
C'est écoeurant, révoltant et, malheureusement, ça n'aura aucune conséquence. Indignation superfétatoire.