France 5 a diffusé dimanche, en seconde partie de soirée, un documentaire très intéressant sur les vicissitudes qu'a connu "Le livre noir" élaboré par le comité antifasciste Juif , 38 écrivains russes? le tout sous la direction des auteurs soviétiques Ilya Ehrenbourg et Vassili Grossman. C'est Albert Einstein qui avait suggéré et appuyé la réalisation de cet ouvrage qui se heurta à la censure du parti "parce qu'il laissait penser que seuls les Juifs avaient été systématiquement massacrés par les nazis en Union Soviétique".
Ce documentaire contenait beaucoup de documents photos ou cinéma provenant d'URSS. Noir et blanc ces films et ces photographies étaient intéressantes à la fois par leur beauté, leur rareté, leur message (souvent sous entendu) et par ce qu'elles disaient de la vie en URSS avant et pendant la dictature stalinienne. Les hommes et les femmes, les voitures, les vêtements, les moyens de transports, les villes, la guerre, tout ce qui n'était pas le sujet du film mais son contexte était à la fois étonnant et révélateur.
On nous a tellement dit que la patrie de Lénine était une prison géante qu'on était étonné de voir des couples danser, des villes animées, bien éclairées et dans lesquelles circulaient des véhicules de tous genres.
Mais revenons au sujet de ce documentaire et à ce qu'il disait. En 1945, à la fin de la guerre, Staline ne voulait pas qu'on parle du génocide des Juifs par les hitlériens. Son souhait était que l'on confonde les victimes et qu'on parle des millions de morts soviétiques à l'exclusion de toute autre formule ou analyse. On le sait, les désirs de Staline étaient des ordres.
Or Hitler, en juin 41, envahit l'URSS sans déclaration de guerre avec le projet bien arrêté de tuer les commissaires politiques soviétiques, les responsables communistes qui tomberaient entre les mains de l'armée allemande mais il comptait bien exterminer tous les Juifs d'union soviétique.
Le livre noir, écrit pendant et après la guerre, se voulait un témoignage sincère du martyr Juif en URSS. De cette dichotomie ne pouvait que naître un conflit. Et entrer en conflit avec le maître du Kremlin était tout simplement impensable.
Interdit pendant 250 ans le Livre noir n'a pas eu autant de temps à attendre pour être publié: la fin de l'URSS permit sa publication avant ce délai grotesque et offensant qui montre bien ce qu'était ce régime.
J'insiste sur la richesse iconographique du documentaire: un bout de film dans lequel des gens masqués, d'horribles films d'actualité, des extraits de spectacles et des interviewes rares.
Ce régime, comme le laissait entendre Vassili Grossman valait bien son ennemi mortel. Les deux faisaient peu de cas de la vie humaine.
Je n'ai pu m'empêcher de penser qu'aujourd'hui les Etats Unis, la Russie de Poutine, la Chine et d'autres pays comme la Corée du Nord ou la Turquie étaient en capacité, individuellement ou en association de nous imposer bien des tourments.
La guerre est dans le patrimoine génétique de l'homme tandis que l'armement est le plus important domaine d'activités dans lequel les progrès sont ininterrompus.
J'ai appelé ce post "les pendus" parce qu'il y a un passage de film où l'on voit des Juifs Russes après leur exécution et que ces visages risquent de me hanter longtemps.