Ne serait-ce que pour "Le fanfaron" de Dino Risi et "Le conformiste" de Bernardo Bertolucci On pouvait avoir de l'estime pour Jean-Louis Trintignant qui est mort la semaine dernière à l'âge de 91 ans. Il fut un bon comédien de cinéma même si sa filmographie contient des "nanars" peu convaincants ("Le bon plaisir" de Francis Girod, "Le mouton enragé" de Pierre Granier-Deferre", "Le train" du même, une daube certifiée de Philippe Labro "sans mobile apparent" et quelques Lelouch dont le très surévalué "Un home, une femme".
De temps en temps il surprenait (en gangster psychopathe dans "Flic story" de Jacques Deray) et parfois il éblouissait ("Amour" de Michael Haneke).
En regardant son portrait hagiographique sur la télévision d'Etat France 2 j'ai été comme surpris entre la force de l'émotion de celles et ceux qui parlaient de lui et la "banalité de l'homme. Il aimait la course automobiles? c'est une question de moyens. J'aurais sans doute aussi aimé ça. "Il a eu les plus belles comédiennes dans les bras"; oui, c'est son métier qui veut ça! Il a connu des drames (...) certes.
Plus que pour d'autres -et l'extrait de tournage de "Et Dieu créa la femme"(1956) de Roger Vadim le soulignait comme une évidence- son travail, le métier de comédien donnait la sensation que ce n'était pas bien compliqué. Si les Miss Météo, les chanteuses en fin de carrière, les Mr Univers et les rappeurs y parviennent c'est que c'est à la portée de beaucoup, non?
A travers un moment du tournage du film de Claude Lelouch qui lui valut la Palme d'Or du Festival de Cannes on comprenait que tourner un film, pour un comédien, se résume à enregistrer plusieurs fois une scène jusqu'à ce que son metteur en scène soit satisfait. Chaque jour on enregistre 4 ou 5 minutes de films qui, une fois montées forment un tout plus ou moins réussi; plus ou moins inspiré.
Pas de quoi qualifier le défunt de "héros" comme sa belle-sœur liftée à l'extrême ni l'admirer comme s'il avait vaincu l'Annapurna en tongs et maillot de bain comme son ex-femme botoxée à mort.
Bien malgré lui la tragédie de la mort de sa fille Marie l'avait rapproché du public compatissant. Ce drame personnel, étalé malgré lui sur la place publique a eu une incidence considérable sur l'homme et le comédien. Je ne suis pas certain que le voyeurisme ait été évité dans le portrait posthume de Trintignant.
Ex-femme et ex-belle-sœur à bec de canard tenaient à l'auréole de leurs deux défunts.
Je suis resté dubitatif sur l'exercice "théâtral" des "lettres à Lou" d'Apollinaire lues à deux voix par le père et la fille et qui faisait tomber en pâmoison la critique germanopratine. La teneur de ces lettres, me semble t'il, ne permettait pas cet artifice transgressif, osé, incongru.
Madame-ex, gardienne du temple, en avait décidé autrement. on a donc crié au génie.
Les morts célèbres restent intouchables: Sitôt que l'un d'entre eux passe l'arme à gauche il monte au Walhalla et on le pleure éternellement.